Exequatur et succession immobilière
Le lieu de situation de l’immeuble en matière successorale est un critère de compétence exclusive des tribunaux français. Un arrêt rendu par la Cour d’appel de Paris le 9 septembre 2014 rappelle cette règle et refuse en conséquence l’exequatur à un jugement rendu au Congo-Brazaville.
Appréciée en droit commun sous le régime de la jurisprudence Cornelissen, ou en droit conventionnel par l’application d’un accord de coopération conclu avec un pays étranger, la compétence du tribunal étranger est l’une des conditions requises afin que tout jugement étranger reçoive l’exequatur en France.
La compétence exclusive du juge français a décliné dans certains cas, notamment celui de la nationalité française d’une partie, ce qui permet alors l’admission de la compétence d’un tribunal étranger lorsque le litige se rattache de façon caractérisée avec le pays dans lequel la décision a été rendue.
Il demeure néanmoins, notamment, un domaine dans lequel le juge français conserve une compétence exclusive de toute compétence juridictionnelle étrangère : celui de la succession d’un bien immobilier.
La règle est posée en droit français par l’article 44 du Code de procédure civile : « En matière réelle immobilière, la juridiction du lieu où est situé l’immeuble est seule compétente ». Elle a toujours été appliquée en matière internationale, dès lors qu’un bien immobilier est situé en France, en exercice de la jurisprudence Pelassa.
L’affaire tranchée par la Cour d’appel de Paris présentement commenté offre une parfaite illustration de ce principe.
En 2008, le Tribunal de Grande Instance de Brazzaville (République du Congo) rend un jugement prononçant l’ouverture d’une succession et homologue un partage portant sur des appartements situés en France, précisément dans le Val-de-Marne, au bénéfice d’héritiers.
Les héritiers introduisent en 2013 une demande d’exequatur du jugement congolais, devant le Tribunal de Grande Instance de Créteil, afin de pouvoir in fine être considérés comme les propriétaires des biens immobiliers.
La demande d’exequatur est fondée sur la convention franco-congolaise de coopération judiciaire du 1er janvier 1974. Parmi les conditions énumérées pour l’exequatur du jugement figue la compétence du tribunal étranger.
De façon assez prévisible, le Tribunal de Grande Instance de Créteil rejette la demande d’exequatur en raison de la compétence exclusive du juge français pour statuer sur des appartements situés en France. Les héritiers interjettent alors appel.
Dans son arrêt rendu le 9 septembre 2014, la Cour d’appel de Paris confirme l’ordonnance de première instance. Elle rappelle que « le lieu de situation de l’immeuble en matière successorale est un critère de compétence exclusive des tribunaux français ».
Dès lors, le Tribunal de Grande Instance de Brazzaville n’avait pas compétence pour statuer sur la propriété des biens immobiliers situés en France.
L’exequatur du jugement congolais est ainsi refusé. Les héritiers ne sont donc pas considérés comme propriétaires des appartements.
L’affaire a le mérite de démontrer qu’il est prudent d’être conseillé en matière successorale avant d’introduire une action à l’étranger.