La tierce opposition en appel contre l’exequatur d’une sentence arbitrale étrangère
Note sur Cass. Civ. 1re, 26 mai 2021, n° 19-23996
L’arrêt commenté est le dernier en date dans le litige opposant la société koweitienne Al-Kharafi à l’Etat libyen, ce premier tentant depuis des années de recouvrer sa créance en France à l’encontre de ce dernier en exécution d’une sentence arbitrale rendue au Caire en 2013.
Cette sentence avait reçu l’exequatur par une ordonnance du Tribunal de Grande Instance de Paris du 13 mai 2013 confirmée par un arrêt de la Cour d’appel de Paris du 28 octobre 2014.
La Central Bank of Libya avait fait tierce opposition à l’arrêt d’exequatur du 28 octobre 2014 au motif d’un préjudice du fait d’une saisie-attribution pratiquée sur l’un de ses comptes bancaires au Crédit Agricole en son application alors qu’elle n’y avait pas été partie. La Cour d’appel de Paris avait jugé cette tierce opposition irrecevable dans un arrêt du 28 mai 2019, à l’encontre duquel la Central Bank of Libya formait donc un pourvoi en cassation.
La Central Bank of Libya soutenait devant la Cour de cassation que tout jugement est susceptible de tierce opposition si la loi n’en dispose autrement et que le droit effectif au juge implique que le tiers à l’instance arbitrale, susceptible de subir les effets d’une sentence arbitrale rendue à l’étranger, soit recevable à former tierce opposition à l’encontre de la décision prononçant l’exequatur de cette sentence.
La Cour de cassation constate dans son arrêt du 26 mai 2021 que pour déclarer irrecevable l’action de la Central Bank of Libya, l’arrêt du 28 mai 2019 retient que l’article 1506 du code de procédure civile n’ouvre pas la voie de la tierce opposition à l’encontre des sentences rendues en France en matière internationale ou à l’étranger, d’une part, et que le seul recours contre l’ordonnance d’exequatur est l’appel prévu à l’article 1525 de ce même code, dans les cas d’ouverture énumérés à l’article 1520 qui visent la sentence elle-même et non l’ordonnance d’exequatur, d’autre part.
Or, en statuant ainsi, alors que la tierce opposition contre l’arrêt de la cour d’appel ayant accordé l’exequatur constituait une voie de recours de droit commun à l’encontre, non de la sentence arbitrale, mais de la seule décision d’exequatur de la sentence rendue à l’étranger, la cour d’appel a violé les textes susvisés.
En conséquence, la Cour de cassation casse l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Paris le 28 mai 2019 et renvoie le dossier devant la Cour d’appel de Paris autrement composée.
Il en résulte que la Central Bank of Libya sera en droit de discuter de l’exequatur en France de la sentence arbitrale rendue au Caire.